28 Juin Portrait d’impact: Ma Belle Terre, soutenir le bioalimentaire par le sociofinancement
Lancé pendant la pandémie, cet OBNL accompagne les projets d’entreprises du secteur agricole et bioalimentaire dans leur lancement via une plateforme de sociofinancement. Une première au Québec.
« Je suis passionné par les bons produits, les histoires de producteurs, le terroir. Je viens d’une famille proche de la terre. J’ai un amour autant pour le produit brut que le produit fini. » Erwan Dufour a longtemps travaillé dans l’alimentation. Arrivé en 2014 au Québec, il tombe en amour avec le terroir local. « Le Québec est un phare en Amérique du Nord, avec un terroir exceptionnel. Si on prend juste le nombre de fromages qu’il y a ici par rapport aux autres provinces…, raconte l’entrepreneur. Et il y a plein de défis dans l’agroalimentaire, ne serait-ce qu’avec le climat rude. Mais il y a un beau mouvement, avec des gens qui se lancent dans les vignes, le maraîchage ou l’élevage à taille humaine. J’ai été inspiré par tout ce qui se faisait. »
Pour lui, pas de doute, un meilleur avenir passe par une meilleure alimentation, un objectif partagé par de plus en plus d’initiatives locales. Mais trouver les fonds pour se lancer n’est pas toujours évident. L’entrepreneur décide alors de lancer Ma Belle Terre, une plateforme de sociofinancement pour soutenir des projets locaux. Il sonde l’intérêt du milieu agricole et met alors sa plateforme en route, aidé par des amis pour le site internet ou encore le graphisme. Sept mois plus tard, les premières campagnes démarrent.
Le sociofinancement, « un levier fantastique »
Ma Belle Terre n’accompagne que trois ou quatre projets à la fois, pour être disponible avec chaque entrepreneur – certains peuvent demander jusqu’à six mois d’accompagnement. « On travaille avec les gens qui nous approchent pour que leur projet soit vendable, prêt pour une première mise en marché. On regarde les points forts et faibles, et on travaille sur ces derniers. » Tout est évalué : la communauté sur les réseaux sociaux, l’image de marque, la production souhaitée, le plan budgétaire…
« Ces projets ont de belles histoires. Pas besoin d’inventer de faux pitch de vente! plaisante Erwan. Ces gens ont un impact positif par essence, donc pour que la campagne décolle il faut juste le mettre en forme et le numériser pour les réseaux sociaux et pour la plateforme. Le marketing peut aussi servir à faire des choses bien! Je crois dur comme fer que le sociofinancement est un levier fantastique pour ces projets. » Ma Belle Terre mobilise ensuite sa propre communauté pour donner de la visibilité aux projets – « notre ambition, c’est d’avoir environ 20% des contributions qui proviendraient de là, que les gens viennent magasiner sur Ma Belle Terre car ils savent que chaque dollar dépensé a un impact positif », ajoute-t-il – , et en parle dans les médias.
100 000 $ récoltés
Le sociofinancement ciblé sur les projets agricoles et alimentaires est plutôt rare, et inexistant au Québec. « On se fait souvent dire qu’il y a d’autres plateformes de sociofinancement, mais le secteur bioalimentaire y est sous-représenté, y compris sur celles qui fonctionnent bien. C’est seulement 3 à 4% des campagnes », indique Erwan. Sur Ma Belle Terre, les projets ont des valeurs et missions proches, et un projet donne ainsi de la visibilité à un autre.
Les projets choisis? « On donne une chance à tout le monde : c’est la communauté qui juge et fait en sorte qu’un projet voit le jour ou pas, explique Erwan. On a eu une épicerie de quartier qui veut faire de la distribution en circuit court, un vignoble, une érablière, le premier magazine jeunesse sur l’alimentation au Québec… On rassemble toutes les personnes de bonne volonté qui ont un projet pour améliorer le système alimentaire québécois. » Depuis son lancement, Ma Belle Terre a récolté un peu plus de 100 000$ sur huit projets. L’OBNL prélève pour le moment 7% sur chaque campagne pour les frais d’accompagnement, et son budget annuel est complété avec des subventions et des bourses.
L’Esplanade, une validation
Pour se donner de l’élan, l’OBNL a participé à la cohorte Collision en bioalimentaire de L’Esplanade, en partenariat avec Récolte. « Lorsqu’on lance un projet entrepreneurial, on est très seul, donc c’est bien de pouvoir entrer dans une communauté, confie Erwan. L’Esplanade permet aussi de remettre en perspective le projet, de valider des choses et de mettre le doigt sur la différence qu’on peut faire. On va dans des réflexions assez poussées sur un temps court ; ça faisait longtemps que mon cerveau n’avait pas dû aller aussi vite! C’était challengeant mais très positif. Et passer sous la loupe de L’Esplanade est bien pour la marque : ça donne des garanties aux gens. Et pour nous, c’est une belle tape dans le dos! »