29 Mar Portrait d’impact: Electro Carbon, transformer le CO2 en produits chimiques verts
Electro Carbon a mis au point un procédé unique, capable, via l’électrolyse, de convertir le CO2 en sel de déglaçage biodégradable.
« On sait que le CO2 crée des dommages environnementaux importants. Cependant, réduire les taux de CO2 est un beau concept, mais il faut pouvoir l’appliquer dans la réalité avec une technologie capable de créer de la valeur, d’ajouter une dimension de rentabilité économique », indique d’emblée Martin Larocque.
C’est justement ce que propose Electro Carbon, la compagnie qu’il a cofondée en 2019 avec Ulrich Legrand, doctorant en ingénierie chimique et post-doctorant en électrochimie. Ce dernier a mis au point un procédé capable, via l’électrolyse, de convertir le CO2 en produits chimiques verts, dont le formate de potassium.
Ce produit a plusieurs applications industrielles dans un marché mondial et de grande envergure, par exemple sur les pistes d’atterrissage des aéroports et dans les mines. Actuellement, le produit utilisé par les industriels du Québec provient du Moyen-Orient et d’Asie, et sa méthode de production ainsi que son transport occasionnent l’émission de grandes quantités de CO2.
Autre marché potentiel : remplacer le sel de voirie utilisé pour dégeler les routes. Le produit utilisé actuellement cause de nombreux dégâts environnementaux, notamment la contamination des nappes phréatiques et la hausse du taux de chlorure et sodium dans les lacs jusqu’à 50 fois au-dessus des normes. Le produit vert créé par Electro Carbon est quant à lui non corrosif et biodégradable sous 30 jours.
« En plus de remplacer ce sel de voirie, on recycle de vastes quantités de CO2 pendant le procédé électrochimique, donc on a un double impact positif, souligne Martin. Grâce à notre modèle d’affaires régional, on n’a pas non plus de problématique de transport ou de logistique avec nos clients. »
Electro Carbon propose donc d’installer son système chez les émetteurs de dioxyde de carbone, comme les grands industriels qui produisent des résidus indésirables, de transformer le CO2 – faisant ainsi diminuer leur impact environnemental et leur taxe carbone -, et de commercialiser le produit chimique vert qui en résulte. Si les produits bio coûtent souvent plus chers que les conventionnels, ici, pas de « taxe verte » : le produit d’Electro Carbon sera à un prix équivalent à celui issu de la méthode de production conventionnelle actuellement sur le marché.
Martin Larocque, cofondateur d’Electro Carbon.
« Se donner les moyens de nos ambitions »
Entrepreneur en série dans les technologies propres, Martin Larocque gère la mise en place de la structure corporative et financière d’Electro Carbon, tandis que son partenaire, avec son profil scientifique, s’occupe du procédé électrochimique breveté. Pour amener l’entreprise à l’étape supérieure, les associés se sont inscrits à la super cohorte en action climatique d’Esplanade Québec. Ils ont ainsi eu accès à des sources de financement, comme Investissement Québec et Technologie du développement durable Canada (TDDC), avec qui ils sont actuellement en discussion.
« Certains programmes gouvernementaux requièrent notamment que l’entreprise fasse partie d’un accélérateur. Se donner les moyens de nos ambitions, c’est le nerf de la guerre, insiste Martin. En plus, L’Esplanade a plusieurs coachs de haut calibre qui nous aident à améliorer notre compréhension du marché et notre façon de nous positionner. L’organisme a aussi un réseau de contacts importants ; notamment la Ville de Montréal, qui pourrait devenir un grand utilisateur de produit comme le nôtre, en remplacement du produit actuellement utilisé sur les infrastructures urbaines… »
Electro Carbon a développé des partenariats technologiques avec les universités de Sherbrooke, Trois-Rivières, McGill ou encore Polytechnique de Montréal, et vient tout juste de terminer une ronde de financement. Elle est actuellement en phase de développement technologique, avec déjà quelques contrats signés en poche. Le premier système d’électrolyse, appelé ECO100, sera déployé d’ici 12 à 18 mois : il pourra fournir environ 100 tonnes de formate de potassium annuellement.
L’entreprise souhaite ensuite d’ici deux ans sortir l’ECO5000, avec un impact total de 10 750 tonnes de CO2 évitées annuellement – soit l’équivalent du retrait de 2 300 voitures de la circulation ou de l’impact de 750 Nord-Américains, ou encore de planter 512 000 arbres. L’électrolyseur d’Electro Carbon a une durée de vie de 20 ans. « À partir de 2024, on veut déployer deux électrolyseurs par an pendant 10 ans, chiffre l’entrepreneur. On veut en faire un succès au Québec, au Canada, avant de se tourner vers l’international»