13 Juil #7 – 4 solutions innovantes pour la gestion des matières résiduelles
Par Kim Fontaine
Que faire quand, malgré toutes les initiatives sur le recyclage, le Québec n’arrive pas à atteindre ses objectifs et que la quantité de déchets produits ne cesse d’augmenter ?
En effet, selon RECYC-QUÉBEC, chaque habitant éliminait 716 kg de matières résiduelles en 2021. Quand on sait que le gouvernement espérait atteindre 525 kg en 2023, on constate facilement qu’il faudra en faire plus.
Réduire à la source et mieux concevoir nos produits sont des façons concrètes d’y arriver. C’est ce que ces 4 start-ups ont décidé de faire en développant des moyens innovants pour répondre à cette problématique.
1. Bosk Bioproduits
Alternative durable aux plastiques, Bosk se spécialise dans les bioplastiques. Vendue sous la marque REGEN, leur innovation permet de se procurer un produit fabriqué à partir de matières inexploitées et renouvelables issues des opérations de l’industrie papetière.
Largement utilisés dans le monde moderne, la majorité des plastiques proviennent de la pétrochimie. Malheureusement, la plupart de ceux-ci, même ceux qui sont recyclables, finissent dans les sites d’enfouissement, les océans ou encore incinérés.
BOSK produit un matériau semblable au plastique, mais il est fabriqué à partir de ressources renouvelables, telles que les boues de l’industrie des pâtes et papiers. Avec son bioplastique, l’entreprise de Québec propose une réelle alternative pour la fin de vie des produits en offrant une solution entièrement compostable et vendu à coût compétitif.
La directrice générale, Laurence Boudreault explique que leur technologie innovante permet de produire des polyhydroxyalcanoates (PHA), similaires à d’autres matériaux naturels comme le bois ou des matériaux à base de cellulose, de protéines et d’amidon. Sans OGM et non toxique, chaque tonne de bioplastique pourrait éviter jusqu’à 3 tonnes de GES.
Offert sous formes granulés, REGEN™ est disponible en différents grades et couleurs. Il convient à un large éventail de procédés de fabrication tels le thermoformage, le moulage par injection, l’impression 3D et l’extrusion soufflage pour ne nommer que ceux-ci. De plus, leur utilisation dans des applications médicales comme les sutures et les pansements de plaies est déjà commerciale, car le matériau est biorésorbable.
Depuis mai 2023, les bioplastiques REGEN™ sont certifiés par TÜV Austria comme étant industriellement compostables ainsi que biosourcés quatre étoiles – la plus haute distinction. Cette certification indique que les produits sont bien issus de matières d’origine renouvelable et certifient aussi de la qualité de leur renouvelabilité.
Site web de Bosk Biopoduits
Site web de REGEN™
Bosk a été accompagné par les équipes d’Esplanade Québec au sein du programme Accélération en 2019 et du programme Transformation en 2022.
2. Cyrc
Détourner les déchets plastiques pour en faire des objets de décoration en utilisant l’impression 3D, c’est bien, mais s’assurer que ceux-ci ne finissent jamais dans les sites d’enfouissement, c’est encore mieux. Pour y arriver, Cyrc. s’assure de reprendre ses produits en fin de vie pour qu’ils soient recyclés en de nouveaux.
La tendance du mobilier éphémère ou Fast Furniture est un fiasco environnemental. IKEA fabrique une bibliothèque BILLY chaque 3 secondes. Ce meuble est constitué de panneaux de particules plaqués qui ne peuvent pas être recyclés. Depuis 1978, ils en ont produit plus de 60 millions…
En utilisant l’impression 3D grand format, Cyrc propose une alternative qui a le potentiel de changer l’industrie du meuble. En effet, comme les taux de recyclage du plastique ne dépassent pas 9% et ceux des meubles frôle le 0%, leur procédé permet de produire seulement selon la demande et de remanier plus facilement d’anciens produits pour en créer de nouveaux.
Guy Snover et Daniel Martinez, cofondateurs de l’entreprise, estiment qu’il est impératif d’utiliser du plastique recyclé pour soutenir l’économie circulaire des matériaux. Sachant que nous sommes sur une planète aux ressources finies, suffisamment de plastique a déjà été fabriqué. La moitié de ceux-ci n’ont été utilisés qu’une seule fois, et ce, pendant moins d’un an.
Les cofondateurs sont fiers de dire qu’ « un modèle d’économie circulaire est au cœur de notre marque depuis le début. Nous voulons devenir un exemple d’entreprise véritablement durable qui assume la responsabilité de ce qu’elle produit et encourage les autres à suivre son exemple. Nous concevons, produisons, expédions et bientôt recyclons tout dans notre studio à Montréal. »
Cyrc a été accompagné par Esplanade Québec dans le programme Collision en 2021.
3. Brique Recyc
Devant l’absence d’une méthode pour nettoyer la brique directement sur le chantier, des dizaines de milliers de tonnes de briques, encore en bon état, se retrouvent dans les sites d’enfouissement. La Maçonnerie Gratton a décidé de mettre fin à ce non-sens avec la machine Brique Recyc.
Tommy Bouillon, président de Maçonnerie Gratton est abasourdi devant le fait qu’il est moins dispendieux et plus simple de remplacer les vieilles briques d’un immeuble par de la nouvelle brique de moins bonne qualité. « L’économie nous a poussés en dehors de la logique des choses. C’est terrible à dire, mais c’est moins long de tout jeter », explique le président.
C’est avec l’aide de Hugo Cartier, et de son expertise dans le domaine de la robotisation et de l’automatisation, que Tommy Bouillon et son associé David Dufour travaillent tous ensemble pour inventer la machine.
Unique et maintenant brevetée, leur machine offre une technologie qui permet le retrait du mortier directement sur les chantiers de construction. Avec son interface à écran tactile entièrement automatisé et facile d’utilisation, elle offre un rendement de 500 briques à l’heure.
Leur innovation amène un nouveau souffle dans l’industrie tout en faisant une différence concrète en matière de gestion des déchets de construction. En effet, 90% de la brique est détournée des sites d’enfouissement.
Devenue une référence pour le recyclage de la brique, l’équipe souhaite rendre accessible mondialement leur innovation en plus d’offrir une plus grande variété de brique recyclé à un prix concurrentiel. La Plateforme Web-Recyc a pu voir le jour grâce à la collaboration de Brique Recyc avec Architecture sans Frontière, Webster, RECYC-QUÉBEC, Maçonnerie Gratton, la Ville de Montréal, le ministère de l’Environnement, le gouvernement du Québec et autres parties prenantes engagées dans la réduction et la gestion responsable des déchets. « on a le bon produit, la clientèle. Maintenant, il s’agit de répondre à la demande qui explose. »
Cette plateforme est maintenant mise à disposition dans la région de Montréal et les environs. Parallèlement, son concept a été applaudi par la presse européenne, qui le voit comme un outil précurseur dans le domaine de la construction durable et la gestion des CRD.
Brique Recyc a été accompagné par les équipes d’Esplanade Québec dans le programme Collision en 2022.
4. La Transformerie
La Transformerie met en œuvre des solutions positives et efficaces pour enrayer le gaspillage alimentaire. Son projet phare Rescapés a permis de fabriquer 75 000 produits tout en redistribuant plus de 125 000 kg de denrées à des organismes en dépannage alimentaire.
Le gaspillage alimentaire génère 3,6 millions de tonnes d’émissions de GES, soit l’équivalent de 4% des émissions totales de la province. Il ne s’agit pas simplement d’un enjeu présent dans les épiceries et les fruiteries, mais dans l’ensemble des secteurs des systèmes alimentaires au Québec. On estime que 41% de la nourriture produite est perdue et/ou jetée.
Lancé en 2019, le projet Rescapés sensibilise à la réduction du gaspillage alimentaire par la fabrication de délicieuses tartinades, marmelades et sauces. Suite à la collecte des invendus, les fruits à transformer sont mis de côté ainsi que les denrées à redistribuer. Quant à eux, les aliments trop abîmés sont mis au compost. Au final, c’est seulement 7 à 8% du total de la collecte qui est non comestible.
Les opérations de La Transformerie se déroulent principalement dans l’arrondissement de Rosemont-La-Petite-Patrie. Cette proximité d’action assure des impacts positifs au sein de la communauté locale tout en minimisant l’empreinte écologique. Jusqu’à présent l’initiative a permis de mobiliser une communauté intergénérationnelle de 1400 bénévoles.
Visionnaire, Guillaume Cantin, directeur général et un des co-initiateurs de l’OBNL explique que « pour moi, le but d’une organisation qui veut régler une problématique, c’est de ne plus exister. »
En attendant de se faire, deux projets à impact sont en développement : Perte Zéro, un service‐conseil pour accompagner les moyennes et grandes organisations à réduire leurs pertes financières liées au gaspillage alimentaire ainsi que le Laboratoire systèmes alimentaires. L’objectif ? Se donner les moyens d’atteindre un impact systémique. Ce dernier est réalisé en co-direction avec le Centre d’études et de recherches intersectorielles en économie circulaire (CERIEC) de l’École de technologie supérieure.
La Transformerie a été accompagnée par les équipes d’Esplanade Québec dans le programme Accélération en 2019.
Au Québec, dans les secteurs d’innovation entourant les systèmes alimentaires, la santé communautaire ainsi que l’environnement et des changements climatiques, les solutions d’impact sont nombreuses. L’Esplanade est fière de les accompagner dans ses programmes afin de les aider à aller encore plus loin !